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  Un noceur  sentant sa mort imminente entreprit un jour d’aller visiter l’Enfer. Pourquoi ? Lui seul savait. Satan eut vent de son projet. Satan ! vous n’imaginerez jamais combien il peut être mauvais, ce monsieur. Pour vous rouler dans la farine, il n’a pas son pareil. Un vrai boulanger ! C’est ainsi qu’il rassembla dare-dare ses lieutenants. « Lorsque notre illustre hôte viendra, les exhorta-t-il, faites-lui visiter les meilleurs endroits de l’Enfer. Enchantez-le au maximum ! »

Quand vint le visiteur d’un jour, c’est ce qui fut fait. Il lui fut montré : les boîtes de nuit, les hôtels cinq étoiles, les maquis, les terrains de golf, les centres d’affaires, bref tout ce que le coin avait de mieux. Et la visite se termina chez les belles locataires de ces lieux. Leur beauté infernale acheva l’œuvre de mystification entreprise. Et lorsque notre noceur mourut, on plaça ses œuvres sur la balance divine afin de déterminer où il séjournerait. Contre toute attente, il était paradisiable, lui, l’ambianceur ! Ne dit-on pas que les apparences sont parfois trompeuses ? Il demanda néanmoins au Bon Dieu la permission d’aller en Enfer, cet Enfer dont il avait sans doute gardé une bonne impression. Dieu avait juré que les gens du Paradis verraient leurs vœux exaucés et Dieu n’est pas pour se parjurer.

« Que ta volonté soit faite ! lui répondit alors le Tout-Puissant. Et tous les élus qui étaient là purent en témoigner. »    

 

L’homme s’en alla, sifflotant gaiement sur la route de l’Enfer. Il ne tarda d’ailleurs pas à y arriver. Il avait couru à intervalles irréguliers, motivé en cela par la perspective des bonnes choses qui l’y attendaient. Mais dès qu’il ouvrit la porte de l’Enfer : Ô Surprise ! Ô déception… on lui sectionna le bras pour commencer ! Il n’en revenait pas ! Il voulut savoir pourquoi cet accueil frais en lieu et place de celui chaleureux qui lui fut jadis réservé. Satan éclata de rire, un rire goguenard, puis il le lui expliqua posément, comme s’il voulait jouir le plus longtemps possible du tour qu’il venait de jouer à ce pauvre mortel. Il se délectait de chaque mot qu’il prononçait, scrutait le viveur dont le cœur se soulevait, devenait gros comme un poing, s’abaissait, puis se soulevait encore au rythme de la colère qu’il piquait. 

 

« La première fois, tu étais de passage, mon cher ami. Il ne faut pas confondre touriste et résidant ! »


Extrait de Coeur de femme de Adamou L. KANTAGBA, Editions Jetrhro SA, Ouaga, 2012.

Tag(s) : #Création littéraire
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