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A la découverte d’une théorie littéraire made in Burkina Faso
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La poétique magique, une trouvaille des chercheurs burkinabè en littérature

La Foire internationale du livre de Ouagadougou, au-delà, de tous, est aussi une occasion pour les chercheurs burkinabè en matière de littérature, de démontrer la vitalité et le dynamisme de la littérature nationale. A cet effet, une conférence a été organisée par Educ Afrique, un centre de promotion de la culture et des arts, autour d’un thème pour le moins atypique : « La poétique magique : pour une relecture des récits de magie ». Présentée par le critique littéraire Adamou Kantagba, cette communication a permis de faire découvrir une nouvelle théorie de critique initiée par le Professeur Go Issou, de l’Université Ouaga I Pr Joseph Ki-Zerbo. C’était le samedi 25 novembre à l’Institut Goethe de Ouagadougou.

 

Des chercheurs burkinabè qui cherchent et qui trouvent, on en trouve. La poétique magique, en est une preuve, si besoin en était. Telle est la conviction de Adamou Kantagba. Pour développer ce thème : « La poétique magique : pour une relecture des récits de magie », le conférencier a dévoiler les fondements théoriques de cette nouvelle théorie. Il a ensuite dévoilé comment elle permet de décoder ces système encodés que sont les récits magiques. 

A côté des méthodologies traditionnelles (sociocritique, psychocritique…) instruments d’analyse des textes littéraires mille fois utilisés, note M. Kantagba, le professeur Go Issou, a expérimenté avec « bonheur » une nouvelle approche des textes littéraires. Ce nouvel exercice de critique littéraire, précise-t-il, convient à l’étude d’un certain type de textes littéraires africains, en l’occurrence les récits de magie dont foisonne la littérature du continent. Le substantif « poétique » précise encore M. Kantagba, n’est pas à prendre fondamentalement dans son acception traditionnelle où elle se résume à l’étude de la seule poésie. Elle est envisagée aussi et surtout au sens structural comme l’étude des procédés et des techniques qui entrent en jeu dans la création littéraire.

Comment opère alors la poétique magique en tant que stratégie d’interprétation et d’évaluation des récits magiques ? Avant de répondre à cette interrogation, le conférencier a tenu à lever le doute sur certaines idées qui veulent que la magie soit une spécificité africaine. « Pour certains, affirme-t-il, le continent noir est le lieu des mystères et la magie, la sorcellerie, une manière propre aux Africains de traduire leur être au monde ». Contre cette prénotion, la magie est une pratique universelle, insiste-t-il. Elle se définit comme le fait de produire des phénomènes extraordinaires en contradiction apparentes avec les lois de la nature. Pour le conférencier, « ce n’est point la magie qui échappe à l’entendement humain, mais sans doute tout ce qui échappe à cet entendement que les humains ici ou ailleurs appellent magie ».

Parlant donc de magie, il ne s’agit donc pas de phénomène inexplicable, mais de phénomènes inexpliqués. Dans le cadre de la poétique magique, c’est cette définition de la magie comme pratique socioculturelle visant à résoudre un problème social et derrière laquelle se cache toujours « un secret magique » qui est privilégiée. Ce secret magique, note le conférencier, relève et révèle de la part des initiés, des anciens et autres dépositaires des traditions, un vaste savoir dans des domaines aussi variés que sont la médecine, l’éthique, l’écologie, les droits humains… La poétique magique est donc un arsenal théorique et méthodologique permettant de décoder les récits magiques. Dans le cadre de cette science, l’on distingue une triade de magie à savoir : la magie des maléfices, la magie du pacte diabolique, et la magie transgression d’un interdit.

« La magie était un rempart aux violations des règles du bon vivre ensemble en Afrique

Prenant exemple sur la première forme de magie, le communicateur, part du constat que la vie dans toute société humaine nécessite une certaine organisation, un certain nombre de règles pour réguler les rapports sociaux. La pléthore des lois, de codes dont se dotent les Etats traduit à souhait cette impérieuse nécessité. Mais ce besoin de codifier les relations humaines n’est pas l’apanage des sociétés dites modernes. Les sociétés traditionnelles africaines soucieuse de préserver l’équilibre social ont souvent créé un certain nombre d’interdits qui ne sont certes pas écrits mais se transmettent de bouche à oreille et dont la transgression appelle une sanction adéquate de façon à ce que le malheureux sort du transgresseur dissuade d’éventuels fautifs. La magie apparait ainsi comme une solution aux violations des règles du bon vivre ensemble.

Quelles sont les caractéristiques d’un récit magique ? Les principales caractéristiques d’un récit magique sont l’intrigue magique, la triade magique le crime et le secret magique.

« La singularité de l’intrigue du récit magique, c’est qu’elle toujours nouée autour d’un crime magique », affirme le conférencier. A propos de la triade magique, l’auteur fait observer que tout récit trace en quelque sorte un itinéraire qui conduit le personnage de l’histoire d’un point A à un point B. Dans le cadre du récit magique, chaque étape de la structure triadique doit être marquée du sceau de la magie. Il faut en outre qu’au-delà de la magie qui domine le récit, que l’intrigue se noue, évolue et se dénoue grâce à la magie. La troisième et dernière caractéristique d’un récit magique, est le crime magique.

A l’instar du roman policier, note le conférencier, le crime est un élément constitutif indispensable du récit magique. Le crime magique s’entend non seulement comme tout crime commis par le biais de la magie, mais aussi de toute forme de transgression, de violation d’un interdit sacré et aux sacrifices rituels à des fins d’ascension sociale fulgurante. Ainsi, si dans le roman policier, on fait appelle au détective pour élucider le crime, démasquer le coupable et le sanctionner, dans le récit magique, seuls les acteurs de la magie ou magiciens ont compétence pour démêler l’énigme.

Le dernier élément de la poétique magique, est le secret magique. « Derrière toute pratique magique, il y a nécessairement, un secret ». Dans le cas de la magie des maléfices, les acteurs de la magie se révèlent être de véritables savants africains avec de solides connaissances dans le domaine de la médecine, de la chimie, etc. qui permettent à l’un de concevoir des poisons et à l’autre des contrepoisons.

En conclusion, pour le chercheur, l’application des outils théoriques et méthodologiques de la poétique magique permettent d’aboutir à des conclusions fort intéressantes. Il s’agit notamment de l’existence d’un code pénal africain, d’un code scientifique africain et celui d’un code moral africain.

L’auditoire s’est félicité de cette nouvelle technique qui démontre que les chercheurs burkinabè et africains ne se contentent pas de consommer ce qui vient d’ailleurs. Ils en ont également à prouver au reste du monde.

Ousmane TIENDREBEOGO

Tag(s) : #Critique littéraire, #Actualité, #Création littéraire
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