Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

LITTÉRATURE BURKINABE ÉCRITE
LITTÉRATURE BURKINABE ÉCRITE
LITTÉRATURE BURKINABE ÉCRITE

Taryam ou la chronique d’une réussite

Après la génération des « pères-fondateurs » de la littérature burkinabè écrite d’expression française, pour user de cette métaphore politique (Nazi Boni, Titenga Frédéric Pacéré, etc.), après celle de l’ « entre-deux » (Jacques Prosper Bazié, Pierre Claver Ilboudo, etc.), une jeune génération d’écrivains non moins ambitieux, non moins talentueux est en train d’émerger.

Les sacres plus ou moins récents de Ghislaine Sanou (nouvelle), Jeux de la Francophonie Niamey /Niger, de KPG (conte) aux Jeux de la Francophonie Beyrouth/Liban, d’Aristide Tarnagda (théâtre) par le Grand prix littéraire d’Afrique noire pour ne citer que ces exemples-là sont des indicateurs qui, même si l’arbre ne doit point cacher la forêt, rassurent quant à la qualité de la relève littéraire au Burkina Faso.

http://kantadamoul.over-blog.com/2018/06/grand-prix-litteraire-d-afrique-noire-2017.html

Cette consécration internationale fait des émules au plan national où l’on constate depuis quelques années un regain d’intérêt pour la littérature, l’écriture. Les publications, que ce soit avec l’appui de l’administration publique (subventions du Fonds de promotion culturelle du BBDA et/ou du Fonds de développement culturel et touristique) ou à compte d’auteur et/ou d’éditeurs, se multiplient.

Effectivement, il ne se passe pratiquement plus un mois sans que la presse traditionnelle, les médias en ligne, les réseaux sociaux n’annoncent le baptême-dédicace d’une œuvre littéraire. C’est du reste l’objet de ce présent billet : annoncer la naissance du nouveau bébé littéraire, Taryam, d’Issouf Savadogo. Passant du statut de manuscrivain à celui d’écrivain, il agrandit le cercle des scripteurs burkinabè dont il diversifie par la même occasion l’offre littéraire.

Si les romans burkinabè à commencer par le texte fondateur de cette littérature moderne à savoir Le Crépuscule des temps anciens ainsi que ceux qui ont suivi (L’Épave d’Absouya, Les Dieux délinquants, Le Mal de peau, Le Retour de Yembi, Adama ou la force des choses, Cœur de femme, Le Sceau des Révolutions, etc.) sont réputés dramatiques voire tragiques, en ce qui concerne surtout leur chute, le récit de Savadogo opère une rupture drastique dans ce registre-là

http://kantadamoul.over-blog.com/2017/02/jacques-prosper-bazie-vu-par-un-critique-beninois.html

En effet, dans les quatorze chapitres qui constituent Taryam, le narrateur extradiégétique-hétérodiégétique pour changer raconte du chapitre 1, « La naissance » au chapitre 14, « La reconnaissance » en passant par les chapitres : 3(« À l’école »), 5 (« Le collège »), 11 (« Les résultats), 13 (« Le pays du Blanc ») la chronique d’une réussite, celle de Taryam, le protagoniste principal qui donne du reste son nom au roman.

Si d’un point de vue strictement pragmatique la chronicité, l’aspect chronique, du récit permet une plus grande accessibilité (la lecture en ainsi est facilitée), sur le plan esthético-stylistique, elle constitue une de ses démérites car cette linéarité du récit crée forcément une certaine monotonie dans la lecture.

D’un point de vue esthétique, n’est-il pas en effet plus beau de lire un récit dynamique qui alterne volontiers récit premier et récit second que de lire un récit « lisse », linéaire qui s’écoule tel un long fleuve tranquille ? L’usage des anachronies narratives (analepse/prolepse) aurait sans doute contribué à la construction formelle du beau dans le récit en brisant justement sa linéarité.

Au-delà de rompre d’avec cette tendance au drame et à la tragédie des romanciers burkinabè évoquée plus haut, l’autre mérite romanesque de Taryam, c‘est son ancrage culturel. L’auteur insère dans le tissu narratif bon nombre de genres de la littérature orale à savoir les énoncés sentencieux et laudatifs appelés couramment proverbes et devises. Comme dans les sociétés traditionnelles, les propos des personnages sont ponctués de ces perles de sagesse qui leur donnent une certaine profondeur au-delà de les embellir.

 Professeur certifié de lycées et collèges, Issouf Savadogo signe là un roman pédagogique. Le parcours ascendant du jeune héros parti de rien (né à Cônôdeni, « un petit village sans électricité » de parents relativement pauvres, son père Noraogo est un vieux retraité ; sa mère Bambayam, une ménagère) pour devenir quelqu’un (docteur en médecine et entrepreneur social) est un appel à l’espoir et à l’espérance à l’endroit de la jeunesse. Malgré les obstacles, la réussite est encore et toujours possible !

 Puisse cette plume singulièrement optimiste trouver, en dépit de tout, sa place à l’intérieur du champ littéraire burkinabè et connaître un parcours ascendant à l’instar de celui du héros du récit!

 

Adamou L. KANTAGBA

Tag(s) : #Critique littéraire, #Création littéraire
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :