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L. K. Bado dédiçant son ouvrageLaurent BADO, Journal d’un vacancier

 ou le mondre s'effondre davantage  

 

Plus d’une fois, l’homme avait clamé et proclamé qu’il avait composé et qu’il publierait son journal...La dernière annonce publique, en date, c’était lors de la dédicace de L’Hier de Koss-Yam de Roger Nikiéma en mars 2012 au Centre national des arts du spectacle et de l’audiovisuel (Cenasa).

C’est fait ! Le frère Bado, ainsi que l’appelle affectueusement les militants et sympathisants de son parti, le Parti de la renaissance nationale(PAREN), a tenu parole. L’œuvre, Journal d’un vacancier, dont la dédicace, placée sous la houlette de la Société des auteurs, des gens, de l’écrit et des savoirs (SAGES), est intervenue le samedi 3 août 2013 à l’Université de Ouagadougou est désormais disponible en librairie.

Pr Laurent Bado et Dr Dramane Konaté au présidiumL’homme de droit, l’animal politique, Laurent Bado passe donc de ses écrits juridiques, de ses lettres politiques aux belles-lettres et vient, de ce fait, agrandir le cercle des écrivains burkinabè. En effet, Journal d’un vacancier quoi qu’en laisse paraître son titre n’est point un journal intime encore moins le journal le plus long du professeur. Il s’agit d’une œuvre littéraire, d’une nouvelle de 130 pages structurée en vingt chapitres de très belle facture éditée aux éditions Kraal à Ouagadougou.

Tel Pacéré Titenga chantant et apostrophant Manéga ! Manéga ! métaphore de l’Afrique, Laurent Bado célèbre ici, avec beaucoup de lyrisme, son Zoula natal qui semble servir d’ancrage à l’œuvre. Le Glaive des ancêtres, Kilachiu, prend prétexte du texte pour dénoncer, la plume corrosive, l’humour caustique, l’effritement et l’effondrement des valeurs sociales burkinabè et/ou africaines : la solidarité, la déculturation, la banalisation de l’acte de foi, la course effrénée aux biens matériels, etc. 

Une vue partielle du publicL’extrait suivant illustre à souhait l’inquiétude de l’auteur : « La solidarité professionnelle voulait que les professionnels d’une activité socio-économique donnée s’entraident, presque sans bourse délier.  Pour cultiver son champ par exemple, il suffisait au propriétaire de demander l’aide de tous les autres cultivateurs ; on tombait d’accord sur un jour et voilà les travaux exécutés sans autres frais que le zom-kom le matin et le tô clair à midi. Mais aujourd’hui cette entraide a disparu : Baloua devait payer le monde qu’il attendait à 3000F ; et il avait dépensé pour la nourriture, pour la boisson, la kola, le tabac… ».

Bâtie sur une structure antithétique, une opposition : Village /Ville, Zoula/Ouagadougou, Journal d’un vacancier rappelle Ville cruelle de Eza Boto. Et comme Banda, le héros de Ville cruelle, qui réussit toutes ses entreprises dans la forêt (il est issu de ce milieu) et qui échoue systématiquement en milieu urbain ; le « je » narrateur de Journal d’un vacancier exulte au village, à Zoula et se désole en ville, à Ouagadougou où il est constamment en proie au spleen baudelairien. Ce n’est donc point un fruit du hasard si la dernière séquence de la nouvelle consacrée au retour à Ouagadougou est intitulée : « Spleen ».    

Le scripteur, tel ce bon vieux conteur traditionnel, le soir au clair de lune, recourt à la fonction conative du langage pour mieux impliquer le lecteur d’où les très récurrents : « Tenez monsieur !», «Voilà, monsieur... », etc. qui jalonnent le récit.

L’esthétique négro-africaine mais aussi et surtout l’esthétique intertextuelle ne sont pas aussi en reste. En effet, les passages bibliques, la figure du Christ, etc. sont allègrement convoqués et savamment intégrés dans le récit. Très souvent au service de l’argumentation.

Ce qui fait dire au Dr Dramane Konaté que l’auteur a réussi la prouesse technique de faire du schéma narratif un argumentaire rigoureux dont la finalité repose sur une moralité, sinon un enseignement qui incite à la réflexion après avoir démontré l’absurde de la situation.

Journal d'un vacancier1 (2)Tous ces ingrédients rendent l’œuvre, on ne peut plus, digeste. Avec Journal d’un vacancier, Laurent Bado, admis aujourd’hui à la retraite, ouvre ainsi la page d’une nouvelle carrière littéraire. On la lui souhaite tout aussi passionnante que cette carrière administrative qu’il vient de clore.  Adamou L. KANTAGBA, Cercle littéraire & artistique lire & écrire (L&E).

À lire aussi dans le quotidien Le Soir.

Tag(s) : #Critique littéraire
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