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REPENSER LE DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE : PLAIDOYER POUR UNE APPROCHE HOLISTIQUE IV
REPENSER LE DEVELOPPEMENT EN AFRIQUE : PLAIDOYER POUR UNE APPROCHE HOLISTIQUE IV

b-De la dimension harmonieuse des rapports Homme-Nature et pour une sage écologie

L’homme est incapable de créer du vivant. Les ressources naturelles qu’il transforme à travers l’activité économique proviennent de la nature dont le créateur est Dieu. L’homme lui-même est une création de Dieu. L’activité économique et sociale de l’homme doit donc être en harmonie avec les mécanismes minutieux et merveilleux qui réagissent la grande nature pourvoyeuse de ressources naturelles. James Lovelock avait décrit le fonctionnement harmonieux de la planète terre en ces termes : « Une entité complexe, comprenant la biosphère terrestre, les océans et la terre ; l’ensemble constituant un système de feed-back ou cybernétique qui recherche un environnement physique et chimique optimal pour la vie pour la planète. La préservation de conditions relativement constantes par un contrôle actif pourrait être décrite de manière satisfaisante par le terme homéostasie.»[1]  

 Toutefois, le développement économique des nations a rompu l’équilibre écologique de la planète. À ce propos, N’Goran (2014) fait remarquer avec justesse : « Le prestige des sciences économiques …en tant que sciences sociales d’excellence dans l’enseignement des humanités a fait perdre conscience qu’un cordon ombilical originel rattache fondamentalement la science économique à la science de la vie et des milieux naturels ou mieux, à l’écologie et à l’éthologie » [2]

À ce propos, le décalogue de la sage écologie inspiré de l’enseignement de Saint François d’Assise a énoncé un certain nombre de règles de gestion éthique pour un meilleur rapport homme – nature. Parmi ces règles on peut citer [3] :

- « Rappelle-toi que Dieu t’a confié la terre et toutes les autres créatures pour que tu vives, connaisses, partages et aimes en louant Dieu ».

- « Obéis aux lois de la création sans les adapter à tes intérêts, connais-les de plus en plus et applique- les en respectant les règles éternelles de l’éthique universelle ».

- Avec ton travail humain, prends soin de la création que Dieu t’a confiée. Diversifie et recycle les déchets produits.

- « Ne gaspille inutilement, afin que tous ses frères puissent se partager les biens de la nature ».

Rappelons aussi que la biologiste kényanne, Wangari Maathai, prix Nobel de la paix en 2004 nous a laissé comme enseignement, la pratique des 4R (Réduction, Réutilisation, Recyclage et Réparation) pour une utilisation efficace, efficiente et durable des ressources naturelles qui par définition sont épuisables.          

  1. l’option de développement durable

Du point de vue de l’histoire de la théorie du développement, on est passé du concept de croissance économique à celui du développement (qui englobe les composantes culturelles et sociales) à celui du développement durable à partir des années 80 au regard de l’épuisement des ressources naturelles et des atteintes à l’environnement. Le concept de développement durable est un concept multidimensionnel qui comporte trois grandes dimensions en termes de soutenabilité.[4]

i) La dimension écologique, base des ressources naturelles et qui constitue une contrainte pour les activités économiques. 

ii) La dimension économique qui se réfère à l’utilisation efficace et efficiente des ressources.

iii) La dimension sociale fondée sur l’équité intra-générationnelle et intergénérationnelle.

Au total, tout le monde s’accorde sur le fait que le développent durable doit être à la fois :[5]

- équitable au sens où la croissance économique doit permettre de réduire de façon significative les inégalités de revenus intra-nations et inter-nations ;

- viable pour les écosystèmes dont nous dépendons ;

- vivable pour les individus et les communautés c’est-à-dire orienté vers une grande équité et partant une grande cohésion sociale. 

La dimension éthique du développement durable a été soulignée avec force par le philosophe Hans Jonas[6]. À ce propos, il nous interpelle sur les graves menaces qui pèsent sur le futur de notre mode actuel d’exploitation des ressources naturelle. Il réaffirme le principe de la responsabilité de l’homme et plaide pour l’équité intergénérationnelle.

La théorie du développement constitue certes une grande avancée en matière de théorie du développement sur laquelle le développement des pays africains pourrait se fonder. Toutefois, l’approche actuelle du développement durable demande à être revisitée au niveau des composantes de ses trois dimensions à partir d’une vision existentielle englobante cohérente.

En effet, l’opérationnalisation du concept reste encore problématique. Comme le fait remarquer Etienne Verhaegen : « La notion de durabilité présente une grande vacuité conceptuelle, elle apparaît comme une boîte vide ou un fourre- tout idéologique…. C’est un leurre de croire qu’il est possible de définir des modèles, les politiques ou des pratiques de développement durable sur des considérations purement techno-scientifiques ou économiques ; il y aura de arbitrages à faire entre intérêts, croyances ou valeurs. »[7]

Si le concept de développement durable butte sur son opérationnalité, c’est parce que les fondements principiels sur lesquels doivent se baser ses différentes dimensions (qui sont souvent antinomiques dans leurs composantes) ne sont pas clairement définis.

  1. Pour une approche du développement durable revisitée fondée sur une approche holistique

Parmi les trois dimensions classiques du développement durable, c’est la dimension écologique qui se révèle être la dimension la plus contraignante. La sagesse amérindienne avait pressenti le caractère critique existentiel de l’environnement depuis fort longtemps en indiquant : « Lorsque l’homme aura coupé le dernier arbre, pollué la dernière goutte d’eau, tué le dernier animal et pêché le dernier poisson, alors il se rendra compte que l’argent n’est pas comestible.»[8]

De ce qui, précède, la hiérarchie classique des trois dimensions du développement durable   se présente comme suit : la dimension écologique, la dimension économique et la dimension sociale. Toutefois pour assurer l’unité, la cohérence et l’opérationnalité  des trois dimensions, il est nécessaire de les ancrer  dans une vision d’ensemble sous-tendue par des valeurs spirituelles et socio-culturelles transcendantes à l’instar de Platon qui assignait à sa société idéale des finalités ultimes comme le bien , la justice, la sagesse la vérité, l’harmonie, la perfection, etc. En d’autres termes, il faut faire asseoir le développement durable classique sur des fondements principiels. Une telle approche du développement durable revisitée devrait reposer sur les concepts clés suivants :

 

                                                             Dimension spirituelle

Vision, Respect de la vie, Excellence, Justice,   Amour, Sagesse, Gratitude,   Responsabilité, Unité, etc.

 

 

 

                                                               Dimension écologique

Durabilité, Préservation, Recyclage, Réutilisation, Protection, Harmonie, Précaution, etc.

 

 

                                                               Dimension économique

Rationalité, Efficacité, Efficience, Besoins limités, Réduction, etc.

 

 

 

                                                               Dimension sociale

 Équité, Solidarité, Partage, Bonne gouvernance, etc.

 

 

CONCLUSION

Le futur immédiat de l’humanité en général et de l’Afrique en particulier reste porteur d’irréversibles menaces de destruction et le philosophe Hans Jonas résume cette situation en disant : « Nous sommes en danger permanent d’auto-destruction collective ».[9] Nous sommes donc en situation de crise multiforme aigue, toutefois lorsque les Chinois écrivent le mot crise, ils le font avec deux idéogrammes. Le premier idéogramme signifie danger et le second signifie opportunité.

La crise actuelle qui menace l’humanité et partant l’Afrique (dont la situation est plus critique en raison de de sa plus grande vulnérabilité) peut donc être une opportunité pour elle de mettre en œuvre le principe de la r

 

[1]  James Lovelock cité par Beat Bürgenmeir (2008), Politiques économiques du développement durable, Éditions de Boeck, p.175.

[2] Cyriaque N’Goran (2014), Pour une éthique économique au profit du développement durable et de la pauvreté, Éditions du CERAP, Abidjan, p.21.

[3]  Actes du Congrès international, Human  Responsabilities  Approaching The 21 st Century,  8-10 May 1993

Luxembourg.

 

[4] Claude Njomgang (2009), Economie de Ressources Naturelles et de l’Environnement, Éditions Harmattan, p.18.  

[5] Pascal Monier (2011), Economie générale,  Lextenso éditions, p.185.

[6] la philosophie.com/principe Responsabilité-Jonas.

[7] Etienne Verhaegen (2000), « Le Concept de Développement durable : quelle opérationnalité ? », in Les Etudes et Documents de l’UERD, FLASH, Université de de Ouagadougou,  pp. 61-71.

[8] Visiondevie.canalblog.com.

[9] Cf. Mohamed Bentahar (2014) « Notes de lecture de l’ouvrage de  Hans Jonas »,  https//blogs.mediapart.fr/.

Tag(s) : #Actualité, #Société
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